« Quand on met un coup de roulèr, les passants sont surpris, se retournent, se demandent ce que vient faire cette musique traditionnelle à Paris. Certains commencent à danser. Dans le métro, en tant que musicien labellisé, on cherche à apporter notre joie de vivre réunionnaise », sourit Loran Vélia. Fondateur de Seksion Maloya, il mêle depuis 2014 chants créoles, rythmes ancestraux et harmonies collectives. Le maloya, cette musique de résistance née dans les plantations de canne à sucre, trouve une nouvelle terre d’écho dans les souterrains parisiens. Coups de roulèr, cliquetis de kayamb, vibration du sati : les instruments traditionnels de l’île de La Réunion résonnent et détonnent dans les couloirs. « Parfois on est cinq, parfois dix à jouer. À chaque fois, c’est un grand bazar joyeux. Les gens s’arrêtent, attirés par la voix, le rythmel. Le maloya, ça monte, ça monte, et ça prend tout de suite », affirme Loran Vélia.

Le collectif joue régulièrement aux stations Saint-Michel, Châtelet ou Fort d’Aubervilliers. C’est justement à Aubervilliers que le groupe est repéré par une agente de la RATP. « On jouait souvent à côté du lieu culturel le Point Fort. Après nous avoir écoutés, elle nous a conseillé de passer le casting pour intégrer le label Musiciens du métro. On l’a passé en 2019, et on l’a eu ! »

Un tremplin pour les artistes émergents

Depuis 1997, les auditions du label Musiciens du métro, organisées tous les six mois par la RATP, visent à révéler de nouveaux talents, à leur offrir une scène et une visibilité, tout en agrémentant les trajets quotidiens de millions de voyageurs. Chaque année, 300 musiciens intègrent ce label qui leur donne la possibilité de jouer pendant six mois dans les stations et gares du réseau Île-de-France Mobilités. Le label a vu passer Zaz, Keziah Jones, Lâam, Claudio Capéo, Clément Verzi (finaliste de The Voice 2016), Arcadian ou Haylen.

Véritable institution culturelle, il offre une grande visibilité et ouvre des portes vers d’autres scènes. Grâce à cette visibilité dans le métro, Seksion Maloya a été programmé au festival Villes des Musiques du Monde, puis à Solidays. Cela a permis au collectif de s’installer dans le paysage sonore du métro parisien et de faire rayonner le maloya bien au-delà de la communauté réunionnaise.

Du métro à la scène du Palais-Royal

Bien avant d’être un tremplin, le métro a été un terrain d’expérimentation pour Loran Vélia. « Je descendais tous les week-ends jouer. Ça m’a permis de me construire. Dans le métro, j’ai pu m’exprimer, me découvrir, découvrir mes textes », souligne-t-il. Dans le tumulte parisien, certains filent sans un regard, mais d’autres s’arrêtent, happés par une voix, un rythme, une émotion. « Qu’il y ait une personne ou cent, je donne la même énergie. Avec ma musique, je viens partager quelque chose de chez moi », affirme Loran Vélia.

Le 21 juin, c’est avec ce même enthousiasme que Seksion Maloya se produira sur la scène du Palais-Royal, à Paris. « Ce soir-là, je vais mettre l’ambiance, le feu. Je veux que le public chante, danse. Je représente ce label, j’ai la chance de jouer sur cette scène. Je veux que ce soit la fête, la communion, comme à La Réunion », promet-il.